À Vigo, les parties prenantes d’Europe et d’Afrique discutent de la dimension externe de la Politique Commune de la Pêche

Les 13 et 14 mai 2025, le Conseil consultatif de l'UE sur la pêche lointaine (LDAC, en anglais) a organisé un séminaire à Vigo (Espagne) pour discuter de l'avenir de la dimension externe de la politique commune de la pêche, dans le contexte de son évaluation en cours.

Le LDAC est un organe consultatif composé de représentants des flottes de pêche lointaine de l'UE, d'importateurs, de syndicats et d'ONG actives dans les domaines de l'environnement et du développement. Les participants au séminaire, dont des représentants des organismes régionaux de pêche (CICTA, ATLAFCO), de la direction générale des affaires maritimes et de la pêche de l'UE (DG MARE) et de l'Agence européenne de contrôle des pêches (EFCA), ont eu l'occasion de discuter d'un large éventail de sujets, allant du rôle de l'UE dans la gouvernance internationale des océans aux accords de pêche bilatéraux de l'UE, en passant par la lutte contre la pêche INN, le commerce des produits de la mer et les questions de sécurité alimentaire, y compris dans les pays tiers.

Une nouvelle génération d'accords de partenariat pour une pêche durable ?

Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a chargé le nouveau commissaire chargé des océans et de la pêche de travailler sur une "nouvelle génération" d'accords de partenariat pour une pêche durable (APPD). La DG MARE considère les accords de partenariat de pêche durable comme un élément stratégique de la "nouvelle diplomatie des océans" : « Nous avons besoin d'une approche stratégique de la dimension externe de la pêche de l'UE, afin qu'elle fasse partie de l'agenda plus large de l'UE. Nous continuerons à réaffirmer nos principes : la coopération multilatérale et l'État de droit », a expliqué M. Cesari, chef de l'unité INN à la DG MARE, dans son discours d'ouverture. 

L'une des principales critiques formulées par les organisations de la société civile est le peu de bénéfices tangibles des APPD qui peuvent être observés dans les pays partenaires africains. Au cours de la session consacrée aux APPD, M. El Ktiri, secrétaire général de la Conférence ministérielle sur la coopération halieutique entre les États africains riverains de l'océan Atlantique (COMHAFAT), a appelé à « une vision équilibrée et partagée entre l'UE et le pays tiers », affirmant que le contenu des APPD devrait être « axé sur le renforcement des capacités, les personnes, l'action sociale et la solidarité ». Mme Gorez, coordinatrice de la CAPE, a appelé à plus de cohérence : « Les politiques de développement de l'UE et les partenariats dans le domaine de la pêche doivent aligner leurs objectifs de manière à ce que l'offre faite aux pays tiers apporte des avantages tangibles et visibles aux populations locales ».

Benoît Caillard, consultant F&S Maritime affairs, le cabinet qui a élaboré le rapport d’évaluation des APPD, a convenu avec CAPE que parmi les évolutions possibles pour les APPD, une piste pourrait être une séparation totale du soutien sectoriel de l'accès, et une transition vers un régime de soutien budgétaire, comme cela peut être le cas pour les projets de partenariats internationaux.

Un manque de cohérence dans les politiques

La question de la cohérence a également été soulevée lors de la session sur la manière dont l'UE peut renforcer la sécurité alimentaire, les moyens de subsistance locaux et les pratiques durables dans la chaîne de valeur de la pêche. M. Mari, de l'ONG allemande Bread for the World, a déclaré que « les politiques alimentaires et commerciales de l'UE ne sont pas cohérentes avec les objectifs de développement ». Il a donné quelques exemples, principalement dans le domaine de l'agriculture, où les accords signés par l'UE avec des pays africains ont eu de graves répercussions sur leurs économies locales.

M. Gueye, président d'AFRIFISH-NET, la plateforme panafricaine des acteurs non étatiques de la pêche, organe consultatif officiel de l'Union africaine, a cité l'exemple de la consommation de saumon en Europe : « Le saumon est nourri de grandes quantités de farine de poisson en provenance d'Afrique de l'Ouest ! Il n'est pas possible qu'un consommateur européen mange indirectement en une demi-heure notre apport annuel recommandé de protéines ».

En effet, alors que les flottes de pêche de l'UE n'ont pas accès à la sardinelle - l'espèce utilisée dans les farines de poisson - il n'y a aucun moyen d'empêcher l'importation de farines et d'huiles de poisson sur les marchés de l'UE. Des tonnes de saumon norvégien nourri à la farine de poisson d'Afrique de l'Ouest sont également importées dans l'UE. La production de farine et d'huile de poisson en Afrique de l'Ouest a des conséquences néfastes sur la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance des communautés côtières, en particulier des femmes transformatrices de poisson.

Un fil de discussion résumant les commentaires des intervenants de chaque session est disponible sur X et sur Blusky.

Photo de l’entête: Vue du port de Vigo depuis la salle de séminaire « El Tinglado », par Joëlle Philippe.