En 2015, à Cape Town, une réunion d’experts sur la criminalité dans les pêcheries s’est couronnée par un rapport déclarant que la pêche INN coûte à l’Afrique 1 Milliards de dollars, en indiquant qu’1 poisson sur 4 était volé du continent.

Mais d’où viennent ces chiffres ?

 
 

C’est quoi la pêche INN ?

La pêche illicite, non déclarée et non réglementée rassemble des activités halieutiques contrevenant aux lois et aux conventions nationales et internationales.

Une définition regroupant les trois catégories de pêche peut être trouvée dans le plan d’action international de lutte contre la pêche INN, adopté par la FAO en 2001:

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LA PÊCHE ILLICITE

est pratiquée sans la permission de l’Etat côtier dans les eaux sous sa juridiction en contravention des mesures de conservation et de gestion d’une Organisation régionale de gestion des pêches (ORGP), ou en violation des lois nationales et des obligations internationales.

 
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LA Pêche NON Déclarée

est une activité qui n’a pas été déclarée à l’autorité nationale ou à la ORGP compétente ou qui a été déclarée de manière erronée.

 
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LA PÊCHE NON Réglementée

est menée dans la zone d’application d’une ORGP par des navires sans nationalité ou par des navires battant le pavillon d’un Etat non partie à cette ORGP.

 


La pêche illégale, non déclarée et non réglementée peut avoir des impacts économiques sur les pays africains. Ces impacts sont générés notamment par les pertes de revenus qui pourraient être réalisées en absence de cette activité par les communautés locales. Également, la pêche INN peut réduire les revenus de ces Etats qui proviennent des taxes et des droits de licence et de débarquement qui sont normalement exigés.

 
 
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Ces chiffres proposés sont-ils pertinents ?

La pertinence des chiffres avancés par les experts à Cape Town peut être remise en question en se basant sur une autre étude qui s’est intéressée à la région du pacifique. En effet, cette dernière étude précise que des activités considérées comme relevant d’une pêche INN ne provoquent pas de véritables pertes pour les Etats côtiers mais peuvent même contribuer indirectement à l’économie de ces pays. L’étude explique que la majorité des infractions se limitent à des fausses déclarations de captures et à la pêche avec des méthodes interdites. La réduction de ces infractions n’augmenterait pas les revenus de l’Etat car tout simplement les navires ne paient pas en fonction des captures. La disparition de ces pratiques entrainera juste une baisse des bénéfices des entreprises de pêche.

 
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Le chiffre de 1 milliards de dollars pour le continent africain est également douteux car il trouve sa source dans une autre étude conduite en 2005 par le gouvernement du Royaume Uni et MRAG dont les méthodes sont fortement critiquables. L’étude s’est basée sur des chiffres émanant de 8 pays à travers des sources anonymes et ambiguës pour ensuite les calquer sur l’ensemble du continent en créant une formule liée aux scores de chaque pays en bonne gouvernance selon la banque mondiale. Le lien entre les pertes causées par la pêche INN et la bonne gouvernance ne semble pas évident et n’a pas été bien expliqué dans cette étude.

 
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Il faut conclure que cette estimation qui est liée au chiffre proposé par l’étude de 2005 ne reflète pas vraiment la réalité. Il s’agit d’un chiffre qui manque de rigueur pour plusieurs raisons comme par exemple les chiffres sur lesquels l’étude s’est basée, non seulement elle a intégré des flottes qui ne débarquent pas leurs prises nécessairement en Afrique mais aussi elle a négligé les prises qui proviennent de la pêche artisanale maritime et continentale. De ce fait, on ignore si le chiffre 1 sur 4 est supérieur ou inférieur aux pertes réelles mais il faut conclure quand même qu’il ne reflète pas nécessairement la réalité des choses.

En tout état de cause, la pêche INN demeure un fléau à combattre étant donné qu’elle est directement liée à la surpêche et donc elle présente un risque à la sécurité alimentaire. Ceci ne doit pas passer par des estimations exagérées ou non rigoureuses, mais plutôt à travers des méthodes de recherche et d’inspection qui prennent en considération la spécificité de chaque région, notamment lorsqu’il s’agit d’une région aussi complexe que le continent africain.






Cette note informative a été rédigée sur base d’un article d’analyse écrit par le Dr. André Standing, publié seulement en anglais sur notre site.