Échange de dette des Galápagos : « Ces accords favorisent la privatisation de la gestion de zones stratégiques sans le consentement des personnes qui vivent sur ces territoires »

ENTRETIEN AVEC EVA MARTíNEZ, AVOCATE SPÉCIALISTE DES DROITS HUMAINS

Dans cet entretien, Andre Standing échange avec Eva Martinez, du Centre des droits économiques et sociaux en Équateur. Eva est avocate et titulaire d'un master en droits humains et relations internationales, elle s'est spécialisée sur les questions de genre. Au CDES, elle dirige les travaux sur la justice économique et les questions de genre et se concentre plus spécifiquement sur les liens entre dette extérieure et droits humains. Par le biais du Mécanisme indépendant de consultation et d'investigation de la Banque interaméricaine de développement, elle a aidé les communautés des Galápagos à déposer une plainte et à parvenir à un accord concernant l’échange de dette contre nature. Elle coordonne également des formations en plaidoyer politique et économies communautaires qui sont destinées aux femmes autochtones d'Amazonie.

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CONTEXTE

En mai 2023, les sociétés Ocean Finance Company et Aqua Blue Investements, la Fondation Bartelli et le Pew Charitable Trust via le Ocean Legacy Project ainsi que la banque Crédit Suisse ont collaboré en vue d'accorder un « prêt bleu » de 656 millions $ US au gouvernement équatorien. Cet argent, provenant d'un fonds commun de créances (en anglais : Special Purpose Vehicle) basé dans le paradis fiscal qu'est l'Irlande, a été accordé au gouvernement équatorien pour financer le rachat de la dette qu'il avait contractée auprès d'investisseurs privés sous forme d'obligations libellées en dollars américains. Cette opération sans précédent a permis au gouvernement équatorien de rembourser 1,6 milliard $ US de dette à des créanciers privés. À l'époque, l'Équateur se trouvait dans un situation économique désastreuse, rendant possible cette transaction. En effet, la valeur marchande de ses obligations avoisinait 40 % de la valeur du capital de départ. De nombreux détenteurs d'obligations équatoriennes ont donc été ravis de pouvoir convertir en espèces ces actifs en perte de valeur (ils ont finalement obtenu un peu plus que le taux du marché, soit environ 45 % de la valeur du capital de départ).

Le Crédit Suisse a émis une obligation, baptisé Bon Marin Galapagos, qui a permis le financement de ce prêt bleu. Malgré les lambeaux d'informations quant à l'origine des investisseurs, il s'agit très probablement de sociétés de gestion d'actifs et de fonds de pension américains et européens, qui souhaitent montrer à leurs clients qu'ils soutiennent l'investissement vert. Une caractéristique essentielle de cette obligation bleue réside dans les garanties de crédit accordées par le gouvernement américain et la Banque interaméricaine de développement (BID) qui ont permis de réduire le taux d'intérêt de l'obligation.

En contrepartie de ce prêt, le gouvernement équatorien a accepté d'étendre les aires marines protégées (AMP) autour des îles Galápagos et s'est engagé à verser à un nouveau fonds, le Galapagos Life Fund (GLF), environ 17,5 millions $ US par an pour les 18 prochaines années. Par conséquent, la majeure partie des fonds que l'Équateur semble avoir économisés grâce à l'opération de rachat de dette a été mise de côté pour être dépensée par le GLF. Le GLF est enregistré dans le paradis fiscal du Delaware et appartient à la Ocean Finance Company. Le Conseil d'administration du GLF comprend une minorité de représentants du gouvernement équatorien, une majorité de sièges pour des ONG, un siège permanent pour la Ocean Finance Company, qui a également le statut de trésorier du fonds, et un siège pour l'ONG Pew Bertarelli Ocean Legacy.

Le contrat du prêt bleu accordé au gouvernement équatorien comporte une longue liste d'engagements. Si le gouvernement équatorien ne les respecte pas, il devra s'acquitter d'une amende au fonds commun de créances irlandais, la GPS Blue Financing Company.

Alors que l'Équateur venait de conclure le plus grand échange de dette contre nature au monde, le pays a accepté un nouvel échange encore plus important avec l'ONG environnementale The Nature Conservancy (TNC) qui vise à étendre les aires protégées dans la forêt amazonienne. En Équateur, la question des échanges de dette est une question préoccupante pour de nombreuses organisations nationales œuvrant pour la conservation et les droits des peuples autochtones.


AS : Eva, merci de venir nous parler sur la plainte que avez déposé concernant cet échange. Vous avez collaboré avec d'autres organisations de la société civile (OSC) afin de plaider en faveur d'un changement de gouvernance du Galapagos Life Fund. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ?

EM : Oui, le Centre des droits économiques et sociaux (CDES) et plusieurs autres OSC ont déposé une plainte officielle auprès du Mécanisme indépendant de consultation et d’investigation de la BID. Notre plainte repose sur plusieurs inquiétudes que nous avions au sujet de l'échange de dette.

La première concerne le manque de transparence. Bien que la BID affirme avoir respecté sa politique d'accès à l'information, elle a, dans la pratique, rendu difficile l'accès du public à des documents clés relatifs à l'opération. Auparavant, nous avions aussi déposé une demande d'accès à l'information publique auprès de l’Équateur, mais le ministère de l'Économie et des Finances n'a pas fourni tous les documents demandés, notamment les analyses financières, les termes du contrat et les documents relatifs à l'évaluation des obligations. L'opacité du processus nous empêche de savoir avec certitude qui sont les bénéficiaires finaux de la transaction et quels sont les coûts à long terme pour l'Équateur.

La deuxième concerne le manque de participation citoyenne et de consultation préalable. La mise en œuvre de l'échange a été réalisée sans consultation préalable suffisante des communautés des Galápagos, ce qui viole l'article 398 de la Constitution équatorienne. Cet article exige la consultation des communautés pour toute décision susceptible d'avoir un impact sur l'environnement. Bien que certaines réunions aient été organisées par des acteurs privés, tels que Pew Bertarelli Ocean Legacy, celles-ci n'ont pas respecté les normes en matière de consultation contraignante ni garanti une représentation effective des habitants des îles.

La troisième plainte concernait la perte de souveraineté dans la gestion des ressources publiques. Le GLF, entité chargée de gérer les fonds générés par l'échange, a été constitué dans le paradis fiscal du Delaware (États-Unis) et sa structure de gouvernance se compose en majorité d'acteurs privés internationaux. Cela signifie que les décisions concernant l'utilisation de ces ressources échappent au contrôle souverain de l'État équatorien ainsi qu'à celui des communautés locales. Cette situation soulève des préoccupations quant à la manière dont les ressources sont utilisées et l'alignement de ces actions avec les priorités nationales et locales en matière de conservation.

Enfin, la plainte soulève des préoccupations quant à l'absence de mécanisme de contrôle efficace. Sans système clair de suivi et de contrôle des fonds, les doutes persistent quant à l'utilisation des ressources et à leur adéquation avec les objectifs de conservation.

Compte tenu de ces préoccupations, nous avons demandé au Mécanisme indépendant de consultation et d'investigation de la BID d'intervenir afin de garantir la publication intégrale de tous les documents relatifs à l'échange de dette, y compris les accords contractuels et financiers, et la mise en place d'un processus de consultation citoyenne efficace et contraignant aux Galápagos en ce qui concerne la gestion des fonds et l'administration du GLF. Nous avons également réclamé, d'une part, la révision de la structure de gouvernance du GLF afin de garantir une participation équitable des représentants de la société civile et des communautés locales, et, d'autre part, un audit indépendant des coûts et des avantages réels de l'opération, y compris l'identification des bénéficiaires finaux du Bon Marin Galápagos.

AS : Êtes-vous satisfaite du résultat de votre plainte auprès du Mécanisme indépendant de consultation et d'investigation de la BID ?

EM : Dans une certaine mesure, oui. L'accord conclu dans le cadre du Mécanisme indépendant de consultation et d'investigation constitue un progrès en matière de transparence et de participation dans la gestion des fonds issus de l’échange de dette contre nature des Galápagos. Cependant, ces garanties auraient dû être mises en place dès le départ, avant même la mise en œuvre de l’échange. Pour cette raison, il est difficile de qualifier l’accord sous le Mécanisme de véritable « avancée ».

« Suite à notre plainte, les communautés de Galápagos ont pu obtenir des avancées concrètes en matière d’accès à l’information et de participation à la prise de décision. Toutefois, les aspects financiers liés à l’échange n’ont pas été abordés. » »
— Eva Martínez, CDES

Le résultat de notre plainte permet au CDES et aux communautés des Galápagos d'obtenir des avancées concrètes en matière d'accès à l'information et de participation à la prise de décision, mais les questions financières de l’échange n'ont pas été abordées car les membres du personnel du Mécanisme indépendant de consultation et d'investigation ne sont pas compétents en la matière.

Nous nous réjouissons que l'accord sous le Mécanisme prévoie la participation d'une ONG locale et d'un observateur issu des communautés au conseil d'administration de l’organisme qui gère les fonds, le GLF. Le GLF s'est désormais engagé à rendre publiques les informations relatives aux projets financés. Nous avons également obtenu que 18 % au moins des ressources soient allouées à des organisations sociales et communautaires locales, ce qui constitue une mesure essentielle pour éviter la concentration des fonds dans les mains de grandes ONG environnementales. Néanmoins, certains aspects financiers de l'accord restent encore flous.

Les résultats positifs sont pertinents car ils établissent des mécanismes de contrôle qui n'existaient pas auparavant et permettent une participation accrue des communautés dans le suivi des engagements pris. Cependant, malgré ces avancées, des inquiétudes importantes subsistent quant à la mise en œuvre de l'accord. Jusqu'à présent, le fonctionnement du GLF se caractérise par un manque de transparence et de communication efficace avec les communautés, ce qui posent des questions quant à sa réelle volonté de respecter ses engagements. Il est essentiel de suivre de près la mise en œuvre du GLF, d'exiger le respect des engagements en matière de transparence et de participation, et de continuer à dénoncer toute tentative de gestion exclusive ou arbitraire de ce fonds.

AS : Pourquoi avez-vous déposé plainte auprès de la BID et non auprès de votre gouvernement ?

EM : Nous avons déposé une demande d'accès à l'information publique auprès du ministère de l'Économie et des Finances de l'Équateur afin d'obtenir des documents clés sur le fonctionnement financier de l'échange de dette contre nature aux Galápagos. Cependant, le ministère n'a pas fourni toutes les informations demandées, nous empêchant ainsi de connaître en détail les termes de l'accord, les coûts réels pour l'Équateur, les mécanismes de gestion des fonds et les bénéficiaires finaux de l'obligation Galápagos. Le manque de coopération du gouvernement équatorien nous a amenés à rechercher d'autres instances responsables.

« Nous exigeons toujours qu’au moins 18 % des ressources financières soient allouées à des organisations sociales et communautaires locales afin d’éviter que les fonds se concentrent uniquement entre les mains de grandes ONG environnementales. » »
— Eva Martínez, CDES

En outre, nous avons tenu des réunions avec des représentants de la BID pour demander des éclaircissements sur les aspects financiers et de gouvernance de l'échange de dette. Cependant, les réponses se sont révélées insuffisantes et peu claires, renforçant nos préoccupations quant au manque de transparence du processus.

Étant donné que la BID a joué un rôle clé dans la structuration et la garantie du prêt bleu, nous avons estimé qu'elle avait la responsabilité de veiller à ce que l'opération respecte les principes de transparence, de participation citoyenne et de respect de la souveraineté équatorienne. N'ayant reçu de réponse satisfaisante ni de la BID ni du gouvernement équatorien, nous avons décidé de déposer une plainte auprès du Mécanisme indépendant de consultation et d'investigation de la BID, qui est la voie officielle pour signaler d'éventuelles violations des politiques de la banque en matière d'accès à l'information, de participation et de garanties environnementales et sociales.

AS : En ce qui concerne la gestion du GLF, le président du conseil d'administration, Robert Weary, a auparavant travaillé pour TNC avant de fonder il y a quelques années une société d’investissement basée aux États-Unis, Aqua Blue. Cette entreprise ne dispose pas de site web, ce qui empêche de connaître la nature exacte de ses activités ou l'identité des autres personnes qui y travaillent. Par ailleurs, Robert Weary est également le trésorier permanent du GLF, bien qu’il soit présenté sur le site du Fonds comme représentant d’Ocean Finance Company. Un autre membre du conseil d'administration, Robert Roeder, est quant à lui employé par la fiducie privée d’un milliardaire italien qui investit dans des hôtels de luxe et des projets d’écotourisme.

On peut supposer que les membres du conseil d’administration agissent de bonne foi et qu’ils souhaitent sincèrement contribuer à un développement équitable et durable en Équateur. Toutefois, il est frappant de constater que, du fait de leur rôle consultatif dans une opération financière, ces personnes se retrouvent à siéger dans un organe qui décide de l’utilisation de millions de dollars de fonds publics équatoriens, destinés aux îles Galápagos pour les vingt prochaines années. Comment, selon vous, les Équatoriens perçoivent-ils l’implication de tels acteurs privés dans la gestion du GLF ?

EM : Le fait qu’une transaction financière permette à des acteurs privés de décider de l’utilisation de millions de dollars provenant de fonds publics est profondément problématique. Dans le cas du GLF, sa structure de gouvernance accorde un pouvoir réel aux investisseurs étrangers et aux organisations privées, tandis que l’État équatorien n’y joue qu’un rôle marginal. Cela limite considérablement la capacité du pays à décider de l’affectation de ses propres ressources et ouvre la voie à une gestion opaque, dépourvue de mécanismes clairs de responsabilité et de consultation des communautés locales.

« La structure de gouvernance du Galapagos Life Fund (GLF) accorde un pouvoir de contrôle effectif aux investisseurs étrangers et aux organisations privées, reléguant l’État équatorien à un rôle minoritaire. Ce déséquilibre limite non seulement la capacité du pays à décider de l’utilisation de ses propres ressources et favorise une gestion potentiellement opaque. » »
— Eva Martínez, CDES

La participation d’acteurs privés comme Robert Weary et Robert Roeder à la gestion des fonds issus de l’échange de dette soulève de sérieuses préoccupations, notamment en raison de leurs intérêts commerciaux. Dans le cas de Robert Roeder en particulier, nous avons demandé sa révocation du conseil d’administration, car il occupe une place qui devrait revenir à une ONG locale.

Ce type de situation se reproduit également en Amazonie, suscitant une vive inquiétude et un mécontentement croissant, tant au sein des communautés concernées que dans une large partie de la société équatorienne. Il s’agit d’un signal alarmant : nous risquons de perdre notre souveraineté sur la gestion de ressources stratégiques, essentielles non seulement pour l’Équateur, mais aussi pour la préservation de l’environnement à l’échelle mondiale.

AS : Étant donné les nombreuses critiques suscitées par l’échange de dette lié aux Galápagos, observe-t-on une amélioration dans la manière dont TNC aborde désormais l’échange de dette pour la forêt amazonienne ?

EM : Non ! Les mêmes problèmes se répètent dans l’accord concernant la forêt amazonienne équatorienne. Plutôt que de corriger les erreurs passées en garantissant transparence et participation, on reproduit un modèle où des acteurs privés aux intérêts peu clairs prennent le contrôle de ressources publiques, sans véritable débat démocratique ni assurance que les fonds profiteront réellement aux communautés locales et à la protection de l’environnement.

Ces accords, qui sont censés préserver la biodiversité, servent en réalité à privatiser la gestion de zones stratégiques, sans le consentement des populations qui y vivent. Ce manque de consultation et de souveraineté dans les décisions alimente une profonde méfiance et renforce la nécessité d’exiger plus de transparence, de responsabilité et de participation citoyenne dans ces processus.

AS: Les mêmes problèmes se retrouvent dans d’autres échanges de dette, comme celui conclu par TNC au Gabon en 2023. À ce jour, on ignore toujours comment les fonds seront utilisés dans ce pays. Ce qui est particulièrement préoccupant, c’est que lorsqu’ils sont rendus publics, ces accords sont souvent accompagnés de communiqués de presse affirmant qu’un important travail de consultation des communautés a été mené. Or, les faits que vous décrivez, ainsi que l’expérience d’autres accords similaires, contredisent ces affirmations.

EM : Le manque d’honnêteté et les informations trompeuses sont extrêmement frustrants. Dans le cas de l’échange de dette des Galápagos, le gouvernement équatorien, la BID et les acteurs privés impliqués ont affirmé qu’un processus de consultation avait été mené auprès des communautés locales, y compris le secteur de la pêche artisanale et d'autres acteurs côtiers. Or, cela est faux. Lors des tables rondes organisées dans le cadre du Mécanisme indépendant de consultation et d’investigation, le ministère de l’Environnement nous a précisé que les consultations avaient uniquement concerné la création de la nouvelle réserve marine Hermandad, et non l’échange de dette en lui-même. Selon eux, une consultation n’était pas nécessaire, car la réserve marine n’est pas habitée. Nous ne partageons pas cette interprétation. Toute mesure — ou absence de mesure — ayant un impact sur la conservation des Galápagos a des répercussions directes sur les populations qui y vivent.

« Le gouvernement justifie l’absence de consultation des communautés par le fait que la réserve marine ne serait pas habitée. Cette position est contestable : toute décision concernant la conservation des Galápagos a un impact direct sur les populations locales, qui devraient être pleinement impliquées. » »
— Eva Martínez, CDES

Comme mentionné précédemment, l’article 398 de la Constitution équatorienne est clair : toute décision de l’État susceptible d’affecter l’environnement doit être soumise à une consultation préalable auprès des communautés concernées. En l’occurrence, le choix de lier le financement de la conservation à un mécanisme d’échange de dette aurait dû faire l'objet d'une consultation auprès des populations des îles.

Dans le cas de l’échange de dette actuellement promu pour l’Amazonie équatorienne, la situation est encore plus préoccupante. Il ne s’agit pas seulement de l’obligation de consultation environnementale prévue à l’article 398 de la Constitution, mais aussi du droit à la consultation libre, préalable et éclairée des peuples autochtones, garanti par l’article 57. Ce droit impose que toute décision susceptible d’avoir un impact sur les territoires autochtones fasse l’objet d’une véritable consultation libre, préalable et éclairée.

Or, aucune consultation conforme à ces exigences n’a été réalisée, ni pour l’échange de dette, ni pour la création du « Bio Corridor Amazonien ». Mon organisation a sollicité des informations officielles auprès du gouvernement, mais à ce jour, nous n’avons reçu aucune réponse claire. De son côté, la Confédération des nationalités autochtones de l’Amazonie équatorienne (CONFENIAE) a également exigé des explications, soulignant que ses peuples n’ont jamais été consultés.

Ce que nous observons, c’est un schéma récurrent d’omission volontaire des processus de consultation, tant en matière de protection de l’environnement que de respect des droits collectifs des peuples autochtones. Ces échanges de dette sont présentés comme des accords « verts » et participatifs, alors qu’ils ont en réalité été négociés à huis clos. Les communautés concernées sont informées une fois les décisions déjà prises, sans que leur voix ait été réellement prise en compte. En fin de compte, ce sont les acteurs privés qui exercent un contrôle majoritaire sur les fonds destinés à la conservation, tandis que les populations locales – pourtant directement concernées – sont écartées du processus décisionnel.

La Constitution équatorienne stipule clairement que toute décision de l'État susceptible d'avoir une incidence sur l'environnement doit faire l'objet d'une consultation avec les communautés. La décision de lier le financement de la conservation au mécanisme d'échange de dette aurait dû faire l'objet d'une consultation avec les habitants des îles. Photo: Nathalie Marquis.

AS : Il appartient désormais aux organisations américaines de protection de la nature de se positionner. Il est inacceptable qu’un petit groupe de personnes très fortunées, opérant à travers des structures opaques enregistrées dans des paradis fiscaux, puisse influencer la politique nationale de conservation au moyen d’accords confidentiels. Il est essentiel de rappeler que l’échange de dette des Galapagos ne se limite pas à l’extension des aires marines protégées, mais s'accompagne d'une série d’engagements, par exemple, en matière de gestion des pêches, qui ont un impact à l’échelle nationale.

Par ailleurs, le GLF distribuera les fonds issus de cet échange par le biais d’un système de subventions concurrentiel. Les organisations devront soumettre des propositions, et c’est le conseil d’administration qui décidera lesquelles seront retenues. Ce mode de fonctionnement présente un risque important : les communautés les plus pauvres, qui ont souvent des difficultés à rédiger des propositions de projets, pourraient être exclues du financement. Le conseil d’administration joue donc un rôle central, non seulement en sélectionnant les bénéficiaires, mais aussi en déterminant les priorités d’action. Quelle est votre opinion sur cette manière de gérer les fonds au sein du GLF ?

EM : La manière dont le nouveau fonds gère les ressources financières a été l’une des principales préoccupations soulevées lors du dialogue mené dans le cadre du mécanisme indépendant de traitement des plaintes. Cette inquiétude a été partagée par de nombreuses communautés et organisations impliquées dans la plainte, car, historiquement, les fonds destinés à la conservation aux Galápagos ont surtout bénéficié aux grandes ONG environnementales, tandis que les organisations locales et communautaires en ont été systématiquement écartées.

Il est également important de souligner qu’à ce jour, aucun fonds issu de l’échange de dette n’a encore été distribué. Or, le modèle de financement mis en place par le GLF risque d’aggraver ces inégalités. De nombreuses communautés et organisations de terrain n’ont pas accès aux financements, faute de capacités techniques ou administratives suffisantes pour répondre efficacement aux appels à projets. En revanche, les grandes ONG, mieux dotées en ressources humaines et financières, sont en mesure de capter la majorité des fonds, ce qui perpétue une distribution inéquitable des ressources censées soutenir la conservation.

« C’est un schéma récurrent d’omission volontaire des processus de consultation, tant en matière de protection de l’environnement que de respect des droits collectifs des peuples autochtones. » »
— Eva Martínez, CDES

Ce point a suscité un débat intense lors des négociations. Bien que certains progrès aient été accomplis, il n’a pas été possible de mettre en place un mécanisme de contrôle réellement efficace. Il a été convenu que les représentants du gouvernement siégeant au conseil d’administration du GLF demanderaient qu’au moins 18 % des fonds soient attribués à des organisations sociales, communautaires et à des collectifs locaux des Galápagos. Il s’agit d’une avancée dans le processus, mais cette mesure reste largement insuffisante pour garantir une répartition juste et équitable des ressources.

Un autre problème majeur, qui n’a pas été résolu lors des discussions, concerne les risques de favoritisme et de conflits d’intérêts au sein du GLF. Des propositions ont été faites pour instaurer des mécanismes de contrôle afin d’éviter que les représentants des grandes ONG de conservation — historiquement principaux bénéficiaires des fonds — ne continuent à les redistribuer au sein de cercles fermés, parfois marqués par des liens personnels ou familiaux. Toutefois, ces mécanismes n’ont pas été retenus, laissant le problème entier et toujours présent en arrière-plan.

AS : Le GLF prévoit d’allouer environ 12 millions $ US par an sous forme de subventions. Dans les articles internationaux consacrés à cet accord, cette somme est souvent présentée comme un financement massif, capable de sauver la faune marine des Galápagos et de stimuler une économie bleue durable, notamment par le développement de l’écotourisme. Pourtant, les défis sociaux et environnementaux auxquels les Galápagos sont confrontées ne relèvent pas uniquement d’un manque de financement.

Le tourisme génère déjà plus de 200 millions $ US par an pour l’État équatorien, et des donateurs comme les États-Unis ou la BID ont injecté des millions supplémentaires dans des programmes de conservation. Toutefois, la dépendance économique des îles au tourisme, ainsi que les dommages écologiques liés à sa croissance, posent des problèmes structurels. À cela s’ajoutent des défis socio-économiques majeurs, comme l’augmentation de la pauvreté et des flux migratoires vers les îles. Dans ce contexte, il est loin d’être évident que 12 millions $ US supplémentaires par an suffiront à produire un impact positif durable. Tout dépendra de la manière dont ces fonds seront utilisés. Trop souvent, on pense à tort qu’un apport limité de fonds venant d’ONG ou de bailleurs peut à lui seul résoudre des problèmes profondément politiques et systémiques.

EM : L’octroi de 12 millions $ US par an via le GLF ne suffira pas à résoudre les problèmes de conservation dans les îles Galápagos. C’est une approche simpliste et réductrice. La conservation d'un territoire aussi fragile et complexe nécessite bien plus que des ressources financières : cela demande des politiques publiques cohérentes et ambitieuses, capables de répondre aux pressions structurelles – sociales, environnementales et liées au tourisme – qui affectent l’archipel. Injecter de l’argent ne garantit en rien une conservation efficace. Au contraire, cela peut parfois aggraver les tensions ou créer de nouvelles divisions.

Il est essentiel de reconnaître que la gouvernance passée des fonds de conservation a souvent été inefficace, avec une concentration excessive sur des projets ponctuels, au détriment des besoins de fond des populations locales. Le manque d’investissement dans des infrastructures durables, des services publics de qualité et des alternatives économiques au tourisme a renforcé une dépendance dangereuse, aggravant les phénomènes migratoires et les inégalités.

La dépendance économique des Galápagos au tourisme de masse a engendré de multiples problèmes, notamment des atteintes à l’environnement causées par un développement anarchique du tourisme. Photo : un groupe de touristes sur l’île Bartolomé, de Andre Robles.

Le tourisme de masse a un impact majeur sur la conservation aux Galápagos. L’archipel fait face à un véritable paradoxe : le tourisme, principale source de revenus, représente aussi l’une des plus grandes menaces pour son écosystème. La croissance touristique a entraîné une hausse des migrations, une pression accrue sur les services publics, une urbanisation non maîtrisée et une détérioration de l’environnement. Dans ce contexte, même si un financement annuel de 12 millions $ US peut permettre de soutenir certaines initiatives de conservation, ces efforts resteront limités – voire contre-productifs – s’ils ne s’accompagnent pas d’une régulation stricte du tourisme et d’une planification durable à long terme. Sans une approche globale intégrant les dimensions environnementales et sociales, la conservation risque de rester en décalage avec les réalités du territoire.

AS : Selon vous, le GLF dispose-t-il d’une stratégie bien définie pour l’utilisation de ses fonds, reposant sur une compréhension approfondie du contexte social et politique local ? Et a-t-il mis en place des critères clairs pour évaluer l’efficacité et les résultats de ses actions ?

Ils n’ont pas rendu ces informations publiques. Il n’existe ni indicateur fiable de performance, ni cadre d’évaluation permettant de vérifier si les fonds contribuent réellement aux objectifs de conservation et de durabilité.

Par ailleurs, le GLF communique de manière insuffisante et tardive sur sa vision de la transformation économique des îles, ainsi que sur ses plans pour aborder les problèmes structurels comme les inégalités et la pauvreté. Le GLF ne se limite pas à la protection de la faune marine et à la gestion des pêcheries : il s’intéresse aussi au développement économique et à la rentabilité de l’écotourisme. Ce type d’approche exige une planification rigoureuse et une stratégie claire, mais aucun plan concret n’a encore été publié pour expliquer comment ces objectifs seront atteints.

« Les échanges de dette ont renforcé un modèle de privatisation de la gouvernance environnementale, où l’administration des fonds publics finit entre les mains d’acteurs étrangers et de grandes ONG, sans mécanismes de contrôle démocratique adéquats. » »
— Eva Martínez, CDES

De plus, l'utilisation de ses fonds pour attirer d’autres investissements pourrait conduire à une privatisation déguisée de secteurs stratégiques aux Galápagos. Si l’écotourisme peut créer des opportunités économiques, sans une réglementation rigoureuse et une approche inclusive, ces investissements risquent de bénéficier principalement aux grands tour opérateurs et investisseurs privés, au détriment des communautés locales.

Il faut aussi rappeler le rôle essentiel de l’État dans la conservation. Celle-ci ne peut être confiée uniquement au secteur privé, ni dépendre de la bonne volonté d’organisations privées aux structures opaques, souvent basées dans des paradis fiscaux. L’État équatorien a une obligation constitutionnelle et légale de protéger les écosystèmes et d’assurer un développement durable du pays. Pourtant, les échanges de dette ont favorisé un modèle de privatisation de la gouvernance environnementale, où la gestion des fonds publics revient à des acteurs étrangers et grandes ONG, sans véritables mécanismes démocratiques de contrôle.

Pour garantir une conservation durable des Galápagos, il est donc indispensable d’adopter une stratégie structurelle à long terme, incluant une régulation stricte du tourisme pour prévenir la surexploitation des écosystèmes, des politiques publiques visant à diversifier l’économie locale et réduire la dépendance au tourisme de masse, ainsi qu’un mécanisme de financement public souverain et durable, indépendant d’entités privées aux intérêts opaques.

AS : L’extension des aires marines protégées pourrait représenter un coût de gestion important pour le gouvernement équatorien, tout en réduisant les revenus des communautés de pêche artisanale. Les autorités publiques a-t-il évalué s’il dispose des ressources nécessaires pour assurer une gestion efficace de ces zones ?

EM : Les coûts et les avantages de l'extension de l'aire marine protégée ont suscité des inquiétudes, notamment en termes de gestion et d'impact sur les communautés de pêche artisanale. Si l'échange de dette contre nature vise à financer la conservation de la réserve marine Hermandad, il ne couvre pas nécessairement tous les coûts d'exploitation à long terme.

Les communautés de pêche artisanale s'inquiètent des restrictions qui seront imposées en raison de l'extension de l'aire marine protégée. En effet, leur accès aux zones de pêche traditionnelles pourrait se voir limité et avoir des répercussions sur leurs revenus. Photo: Evan Boehs.

L’un des principaux défis liés à l’extension des aires protégées est qu’elle exige un renforcement des capacités de suivi, de contrôle et de surveillance, ce qui implique des investissements importants en infrastructures, technologies et personnel qualifié. Ce besoin accru pourrait aussi servir de justification à des interventions extérieures, un point sur lequel je reviendrai plus tard.

De même, les communautés de pêche artisanale ont exprimé leurs inquiétudes face aux restrictions induites par l’agrandissement de l'aire marine protégée. Ces limitations risquent de restreindre leur accès à des zones de pêche traditionnelles, entraînant une baisse de leurs revenus. Bien que l’échange de dette prévoie des mécanismes de soutien aux communautés locales, il existe un risque que ces fonds soient insuffisants ou ne bénéficient pas réellement à celles et ceux qui dépendent directement de la pêche pour leur subsistance.

AS : En décembre dernier, votre gouvernement a annoncé la signature d’un accord avec les États-Unis pour l’installation d’une base militaire sur les îles Galápagos. Dans ce contexte, il est difficile de ne pas se demander si le soutien du gouvernement américain au Bon Marin Galapagos a pu influencer cette décision. Quel est votre point de vue à ce sujet ?

EM : L’installation d’une base militaire américaine sur les îles Galápagos constitue une violation directe de la Constitution équatorienne. L’article 5 établit clairement que l’Équateur est un territoire de paix et interdit explicitement la présence de bases militaires étrangères. Cette décision est donc non seulement anticonstitutionnelle, mais elle menace aussi un écosystème extrêmement fragile et va à l'encontre des principes de conservation qui ont officiellement justifié l’échange de dette des Galápagos.

Il existe un lien stratégique évident entre ces deux événements. Ceux-ci s’inscrivent dans une même logique de surveillance et de contrôle de la réserve marine Hermandad, créée en janvier 2022 dans le cadre des engagements de conservation qui ont ensuite mené à l’accord de dette contre nature signé en mai 2023, sous le gouvernement de Guillermo Lasso.

« Derrière le discours environnemental, la présence militaire américaine aux Galápagos répond avant tout à des objectifs géopolitiques dans la région. » »
— Eva Martínez, CDES

Cet échange a permis de restructurer la dette de l'Équateur afin d'obtenir un financement pour la conservation de la réserve marine Hermandad, une aire protégée de 60 000 km² reliant les Galápagos aux aires marines de Colombie, du Panama et du Costa Rica. L’objectif principal était de préserver la biodiversité et de lutter contre la pêche illégale, en renforçant notamment les capacités de surveillance maritime dans la région.

En parallèle, en octobre 2023, l’Équateur et les États-Unis ont signé un « Accord sur le statut des forces » (SOFA), qui définit le cadre juridique de la présence du personnel militaire américain sur le sol équatorien. Cet accord vise à faciliter les opérations conjointes contre le trafic de drogue et d’autres menaces transnationales.

Dans ce contexte, les routes du narcotrafic traversant la réserve Hermandad ont été invoquées pour justifier un renforcement de la présence militaire dans la région. Bien qu’aucune annonce officielle n’ait été faite concernant l’installation d’une base militaire américaine aux Galápagos, la coopération sécuritaire permise par le SOFA ouvre la voie à une expansion des opérations militaires sur le territoire équatorien. Cela pourrait, de facto, aboutir à un contrôle stratégique renforcé dans cette zone.

Derrière le discours de protection environnementale, la présence militaire américaine aux Galápagos semble s’inscrire dans une logique géopolitique plus large. Celle-ci inclut le contrôle des routes de migration et du trafic de drogue dans le Pacifique, la volonté de contenir l’influence chinoise, et l’affirmation d’une présence militaire accrue dans l’hémisphère Sud, dans un contexte où les États-Unis cherchent à renforcer leur hégémonie dans la région.

AS: Dans un entretien, le directeur de l’Ocean Finance Company (OFC) a exprimé son intention de mobiliser davantage de fonds que ceux générés par l’échange de dette initial. L’une des stratégies envisagées consiste à combiner des investissements privés avec des financements publics néerlandais pour racheter des obligations équatoriennes sur les marchés secondaires. Les revenus générés par ces obligations seraient ensuite utilisés pour financer des projets de conservation. Cette approche pourrait s’avérer lucrative et servir de modèle à d’autres ONG environnementales : lever des fonds, notamment publics ou subventionnés, pour acquérir à bas prix de la dette souveraine sur les marchés, tout en s’engageant à utiliser les bénéfices pour des actions de conservation.

EM : Il s'agit là d'un sujet particulièrement préoccupant, car ce qui était présenté à l’origine comme un mécanisme de réduction de la dette de l’Équateur semble évoluer vers une stratégie financière opaque, qui pourrait non seulement tirer parti de la crise économique du pays, mais aussi contribuer à l’aggraver ou à la prolonger.

D’après les informations disponibles, l’OFC envisage de profiter des faibles cours des obligations équatoriennes sur les marchés secondaires pour les racheter en utilisant un financement hybride, mêlant capitaux privés et fonds publics – notamment en provenance du gouvernement néerlandais et de l’Union européenne. Ces obligations, émises à l’origine par l’État équatorien et vendues à des investisseurs privés, sont aujourd’hui proposées à des prix inférieurs à leur valeur nominale, en raison de la situation économique critique du pays.

« Ces montages financiers, dits « verts » ou « durables », deviennent un moyen d’attirer des capitaux, mais la transparence quant aux impacts réels sur l’environnement et le développement fait défaut. » »
— Eva Martínez, CDES

Le modèle de financement proposé par l’OFC consiste à racheter, à prix réduit, des obligations équatoriennes sur le marché secondaire, tout en continuant à percevoir les intérêts (ou coupons) que l’État équatorien verse sur ces titres. Une partie de ces revenus servira à rembourser les investisseurs privés ayant financé l’opération, tandis que le reste sera conservé par l’OFC.

Ce mécanisme présente des similitudes avec celui des fonds vautours, qui rachètent également des dettes souveraines à bas prix auprès de pays en difficulté, puis engagent des poursuites judiciaires pour exiger le remboursement intégral, majoré des intérêts. Même si l’OFC ne prévoit pas d’actions en justice, le schéma reste comparable :

  1. acheter de la dette à bas coût sur les marchés secondaires ;

  2. utiliser des financements publics ou subventionnés pour accroître la rentabilité de l’opération ;

  3. générer des profits financiers à partir de ressources publiques et de capitaux privés.

AS : Grâce à ce nouveau mode de financement, ils peuvent se passer de l'accord du pays débiteur. Ils contournent ainsi entièrement les gouvernements, ce qui les rend encore moins sensibles à la pression de l'opinion publique. Cependant, cela soulève des interrogations sur la finalité des échanges de dette : l’un des principaux arguments en leur faveur est qu’ils devraient contribuer à alléger la dette des pays du Sud.

EM : En effet, ce nouveau modèle n'a rien à voir avec la réduction de la dette de l'Équateur, comme le prétend l'échange de dette des Galápagos. Au contraire, il exploite la crise de la dette du pays pour générer des profits financiers pour des investisseurs privés, sous prétexte de financer la conservation.

Le risque est que ce modèle soit reproduit par d'autres ONG environnementales et des acteurs privés, créant ainsi un marché d'achat de dette souveraine, avec des subventions, sous prétexte de conservation de l'environnement.

Si cela devient une tendance, nous assisterions à l'émergence d'un nouveau mécanisme de financement international qui générerait des avantages économiques pour un petit groupe d'acteurs financiers tout en perpétuant la crise de la dette dans les pays du Sud. À ce sujet, je voudrais mentionner la récente émission d'obligations liées à la durabilité par Difare, avec le soutien de la BID Invest, de Proparco et de la Bourse de Guayaquil. Cela montre comment les acteurs privés explorent de nouvelles formes de financement en utilisant le discours de la durabilité et de la conservation.

Dans ces mécanismes, le financement « vert » ou « durable » devient un moyen d'attirer des capitaux, mais avec peu de transparence quant à son impact réel sur l'environnement et le développement.

Ces types de modèles de financement devraient faire l'objet d'une surveillance beaucoup plus étroite. Parmi les aspects clés à surveiller, on peut citer :

  • Quelles sont les conditions précises de ces financements ?

  • Quelle part des rendements est effectivement allouée à la conservation ?

  • Comment les bénéficiaires sont-ils sélectionnés ?

  • La conservation est-elle véritablement une priorité ou un simple prétexte ?

  • Quel est l’impact réel sur la dette équatorienne ?

Si ces instruments ne font qu’augmenter les charges d’intérêts sans réduire le stock de la dette, ils risquent d’aggraver à moyen terme les déséquilibres budgétaires du pays. Enfin, il est crucial d’identifier qui sont les investisseurs impliqués dans ces opérations. Le manque de transparence entourant certaines entités telle que l’Ocean Finance Company constitue un véritable signal d’alerte.

AS : Merci, Eva, pour le temps que vous nous avez consacré. Nous espérons que votre engagement aux Galápagos et en Amazonie inspirera les groupes de la société civile dans d’autres pays.

Photo de l’entête : Iguanes des Îles Galápagos, de Deb Dowd.