COFI 35 : « Jamais la pêche artisanale n'a suscité autant d'enthousiasme »

La 35e session du Comité des Pêches de la FAO a marqué une étape importante dans l'histoire de la reconnaissance des contributions de la pêche artisanale à la sécurité alimentaire, aux moyens d'existence, à la culture et au bien-être

Les hommes et les femmes qui travaillent dans le secteur de la pêche à petite échelle dans le monde entier sont confrontés au même défi : être reconnus et inclus dans le processus décisionnel. Parallèlement, ils sont de plus en plus confrontés à une concurrence pour l'espace et pour les ressources, car d'autres industries sont promues sous le couvert de l'économie bleue.

Après plusieurs décennies de lutte, la pêche artisanale a réussi à obtenir une large reconnaissance du rôle qu'elle joue dans la sécurité alimentaire, les moyens de subsistance, les économies, la culture et le bien-être. Cette reconnaissance est parvenue après que l'Assemblée générale des Nations unies a déclaré 2022 Année internationale de la Pêche et de l'Aquaculture artisanales et a culminé lors du Comité des pêches de la FAO (COFI), où de nombreux membres ont reconnu et souligné l'importance de la pêche artisanale et soutenu l'idée qu'un "Sommet de la pêche artisanale" soit organisé tous les deux ans avant le COFI. Selon les termes d'un observateur de longue date du COFI, « jamais il n'y a eu un tel enthousiasme pour la pêche artisanale ».

L'appel à l'action : un besoin urgent de poursuivre le dialogue sur la mise en œuvre des lignes directives volontaires de la pêche artisanale

Depuis le début de 2022, les organisations de pêche artisanale d'Afrique et du Pacifique, d'Amérique latine, d'Europe et d'Asie ont uni leurs forces et lancé un appel à l'action à leurs gouvernements.

Elles ont cinq demandes clés, à savoir que les gouvernements (1) sécurisent d'urgence l'accès aux ressources et mettent 100% des zones côtières en co-gestion, (2) garantissent la participation des femmes dans la pêche et soutiennent leur rôle dans l'innovation, (3) protègent la pêche artisanale des secteurs concurrents de l'économie bleue, (4) soient transparents et responsables dans la gestion de la pêche, et enfin (5) construisent des communautés résilientes pour faire face au changement climatique et offrir des perspectives aux jeunes. Ces demandes s'inspirent des Directives volontaires pour la pêche artisanale durable (DVPAD). Les signataires de l'appel à l'action demandent à leurs gouvernements de traduire ces propositions de façon concrète par des plans d'action participatifs, transparents et sensibles au genre, à mettre en œuvre d'ici 2030.

Si seuls quelques-uns des signataires de l'Appel à l'action ont pu se rendre au Comité des pêches à Rome en raison de complications liées à l'obtention de visas, de vols et de logements, ils ont néanmoins continué à faire des vagues. Voici un résumé de leurs interventions en tant qu'observateurs lors des sessions du COFI :

POINT 6 DE L'ORDRE DU JOUR DU COFI : SOUTENIR LA PÊCHE ARtisanale

5 priorités pour les membres du cofi d’ici 2030

M. Felicito Núñez, leader de la communauté de pêcheurs Garifuna au Honduras, au nom des hommes et des femmes de la pêche artisanale des 6 continents, a appelé les membres du COFI à mettre en œuvre les 5 actions prioritaires de leur Appel à l'action d'ici 2030. Cliquez sur la photo pour lire l'intervention complète en 3 langues.

améliorer les conditions de travail des femmes

Mme Micheline Dion, présidente de la coopérative des femmes transformatrices de poisson de Côte d'Ivoire et responsable du programme des femmes de la CAOPA, a souligné les actions spécifiques que les membres du COFI peuvent entreprendre pour améliorer les conditions de vie et de travail des femmes dans la pêche artisanale.

l’appel à l’action se démarque

L'envoyé spécial des Nations unies pour les océans, M. Peter Thomson, et le représentant de l'UE, M. Raphaël Goulet, ont tous deux pris note de l'appel à l'action de la pêche artisanale lancé lors de la conférence des Nations unies sur les océans. Ces derniers ont souligné la nécessité de renforcer la participation des femmes et de consolider la résilience des communautés de pêcheurs face au changement climatique.

 

Point n° 7 : Lutte contre la pêche INN

contributions de la pêche artisanale à la lutte contre la pêche inn

M. Gaoussou Gueye, président de la CAOPA, a appelé à la création de zones d'exclusion côtières exemptes de navires industriels où les pêcheurs artisans peuvent contribuer à la lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN) grâce à une surveillance participative. Il a également appelé les pays à établir un registre des propriétaires effectifs des bateaux afin que ceux qui profitent de la pêche INN puissent être identifiés.

 
 

Point 8 : Proposition d'établissement du sous-comité de la gestion des pêches (SCFM)

les pêcheurs devraient être plus que des observateurs

La CAOPA a soutenu cette proposition, en soulignant que la mise en œuvre des directives sur la pêche artisanale devrait être un point permanent de l'ordre du jour et que les organisations de pêche artisanale devraient participent activement - et pas seulement en tant qu'observateurs intervenant à la fin - aux discussions du SCGP.

un forum pour discuter la mise en oeuvre des directives?

Au cours de la session sur la pêche artisanale (point 6), l'UE a également insisté sur le fait que les questions relatives à la pêche artisanale nécessitent davantage d'attention et de discussions et a suggéré que le SCGP pourrait être utilisé à cette fin.

 

Point n° 9 : Faire face au changement climatique dans le domaine de la pêche et de l'aquaculture

En première ligne

Mme Micheline Dion, s'est exprimée au nom des signataires de l'Appel à l'action : « Nous assistons déjà à la disparition des récifs coralliens, des herbiers marins et des mangroves, et le réchauffement des eaux entraîne la migration de nos poissons vers des eaux plus froides ; Nous sommes également confrontés à des conditions météorologiques extrêmes qui mettent nos vies en danger, ainsi qu'à l'élévation du niveau de la mer et à l'érosion côtière qui rongent les terres où nous vivons et travaillons ». Cliquez sur l'image pour voir l'intervention complète.

Un futur pour les jeunes dans la pêche artisanale

M. Felicito Núñez a plaidé en faveur des jeunes dans le secteur de la pêche, affirmant que le changement climatique et ses impacts, tels que les conditions météorologiques extrêmes causant des pertes de vie en mer et la réduction des captures de poissons, rendent le secteur moins attrayant pour les jeunes et mettent en péril l'avenir des communautés de pêche artisanale.

 

Point n° 10 : Intégrer la biodiversité dans la pêche et l'aquaculture

Consentement libre, préalable, et éclairé

M. Felicito Núñez, leader de la communauté de pêcheurs Garifuna au Honduras, s'est exprimé au nom des signataires de l'Appel à l'action et du Collectif international d’appui aux travailleurs de la pêche : « 30x30 n'est possible que si nos droits humains sont garantis par la loi. La conservation doit se faire avec notre consentement libre, préalable et éclairé, dans le respect de nos formes de gouvernance traditionnelle ».

cogestion, cogestion, cogestion

M. Gaoussou Gueye, président de la CAOPA, a poursuivi et plaidé pour la cogestion : « Nous revendiquons nos droits, mais nous sommes aussi prêts à prendre nos responsabilités pour une gestion concertée des zones côtières, qu'il s'agisse du repos biologique, ou de la lutte contre la pêche INN via la surveillance participative ».

 

Point n° 12 : "Décisions et recommandations du sous-comité de l'aquaculture du COFI".

une aquaculture vraiment durable

La CAOPA a exprimé son inquiétude concernant l'engagement de la FAO à « intensifier et étendre » l'aquaculture : « Le modèle d'aquaculture intensive concerne les espèces carnivores qui dépendent de la farine et de l'huile de poisson, produites en Afrique de l'Ouest à partir de ressources surexploitées, est en concurrence directe avec la pêche artisanale ».

 
 

Photo de l'entête: En raison des restrictions imposées par le Covid-19, la plupart des observateurs ont dû prendre place dans une salle séparée et suivre la discussion sur le zoom, bien que les délégués aient été autorisés à entrer dans la salle plénière. Sur cette photo, M. Gaoussou Gueye, président de la CAOPA (Sénégal), M. Felicito Núñez, leader dans la communauté de pêcheurs Garifuna au Honduras, et Mme Micheline Dion, présidente de l'union des coopératives de femmes transformatrices de poisson de Côte d'Ivoire, représentants des signataires de l'Appel à l'action, debout devant les drapeaux des membres de la FAO dans la salle des observateurs.